Salon Mondial du Tourisme: les grandes tendances pour 2017

Au moment où le Salon mondial du tourisme ouvre ses portes pour quatre jours à Paris, Didier Arino, directeur du cabinet Protourisme, dresse un bilan sombre de l'année passée pour le secteur.

 

Quel bilan faites-vous de l'année 2016 pour le tourisme en France?

C'était une mauvaise année mais moins catastrophique que ce que l'on aurait pu imaginer. Avec 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires perdu, je parle d'une année médiocre. C'est tout particulièrement vrai pour l'Île-de-France qui a perdu 9% de clients pour la période d'hiver et 12% en été. La région paie les conséquences de son absence de stratégie touristique. 

Quelles en sont les causes?

Le printemps a été très mauvais car marqué par de nombreuses grèves (de pilotes, de contrôleurs aériens, de raffineries), les manifestations, Nuit Debout, le mauvais temps, les inondations... L'image de la destination France s'en est ressenti. Sans oublier, le risque terroriste qui a été fort tout au long de l'année.

L'Euro de football a pourtant attiré de nombreux supporters. Cela n'a pas dopé les résultats du tourisme?

On observe l'effet Euro dans les grandes villes organisatrices. Bordeaux, Lyon, Nantes, Toulouse qui, par ailleurs ont adopté des politiques touristiques offensives. Mais cela ne se traduit pas globalement par une hausse des nuitées d'hôtels. Déjà parce que les foules de supporters de foot ont fait fuir les touristes classiques et parce que bon nombre d'entre eux ont privilégié des modes d'hébergement de type Airbnb, notamment à Paris.

Quelles régions ont le plus souffert?

La Bretagne, qui est une destination traditionnellement forte au printemps a souffert des événements défavorables (météo, grèves…) à cette période qui ont découragé les visiteurs britanniques. Les régions Centre, Ile-de-France en ont pâti aussi, ainsi que les châteaux de la Loire. La région PACA était en hausse jusqu'à l'attentat de Nice. Lille était dans une bonne configuration jusqu'à l'annulation de la Braderie. Enfin, les régions Rhône Alpes-Auvergne et Aquitaine ont été portées par le tourisme urbain et aussi un tourisme de proximité d'habitants de ces mêmes régions.

Il y a eu de bonnes surprises?

Oui les grandes villes. Les stations balnéaires d'été telles que La Grande Motte, Arcachon, Les Sables d'Olonne et la Vendée, portée par le succès du Puy du Fou.

Quelles sont les tendances pour 2017?

Cela s'annonce beaucoup mieux. Les réservations sont en forte hausse. Nous avons aussi mené un étude auprès de 2.000 personnes sur les intentions et aspirations pour leurs vacances. Nous en avons tiré un classement des villes préférées. Dans l'ordre: Bordeaux, La Rochelle, Carcassonne, Strasbourg, Aix en Provence et Toulouse.

Vous avez aussi posé la question sur les stations balnéaires préférées?

Absolument. Le classement est alors le suivant: Biarritz, Arcachon, Saint-Jean-de-Luz, Collioure, Saint-Tropez, Cannes. Et par région, le classement place la Corse en tête, suivie du Pays Basque, de la Bretagne, des Pyrénées et du Var.

Quels sont les demandes des vacanciers en 2017?

Ils sont exigeants et veulent un haut de niveau de qualité quelle que soit leur catégorie d'hébergement. Par exemple, le niveau général chez Airbnb s'est grandement amélioré. Les logements y sont plus beaux avec une déco design. De même, les clients plébiscitent les marques! Airbnb, Booking, Abritel, Gîtes de France ont les faveurs des vacanciers. On constate le même phénomène dans l'hotellerie de plein air (le camping) où les groupes qui ont développé une marque bénéficient d'une reconnaissance du public tels Homair ou Sunelia.

Bouleversements touristiques

La Chaire de tourisme Transat dévoile les 10 tendances qui marqueront le tourisme d'ici la fin de la décennie.

Par Pierre-Etienne Caza                                                                25 JANVIER 2016 

 

Photo: iStock

La Chaire de tourisme Transat de l'École des sciences de la gestion (ESG UQAM), en collaboration avec Tourisme Montréal, a dévoilé le 20 janvier les 10 grandes tendances qui marqueront l'industrie du tourisme d'ici la fin de la décennie. Le tourisme expérientiel, sensoriel et immersif deviendra incontournable. L'éclatement des modèles traditionnels et l'omniprésence de la technologie influenceront plus que jamais la planification d'un voyage.

Paul Arseneault
Photo: Émilie Tournevache

Ces courants affecteront les décisions des consommateurs et les actions des intervenants touristiques sur le plan local, national et international. «L'accélération prévisible au cours des quatre prochaines années des tendances sera plus rapide que celle des dernières décennies. Il faudra désormais mieux comprendre l'évolution des voyageurs et de leurs aspirations profondes afin d'anticiper leurs besoins et attentes et y répondre adéquatement, quels que soient les outils ou technologies sous-jacentes pour y répondre», affirme Paul Arseneault, titulaire de la Chaire de tourisme Transat, directeur du Réseau de veille et professeur au Département d'études urbaines et touristiques. Ce dernier a présenté ces 10 grandes tendances dans le cadre du Gueuleton touristique de la Chaire de tourisme Transat, en compagnie de Pierre Bellerose, vice-président, relations publiques, accueil, recherche et développement du produit chez Tourisme Montréal.

Tourisme sensoriel

Le tourisme à l'aube de l'an 2020 sera expérientiel et sensoriel. «Ce type de tourisme existe déjà, souligne Paul Arseneault. À Stockholm, par exemple, il existe un parcours qui présente 40 lieux aux sonorités particulières. L'idée, c’est que le voyageur puisse se procurer cette trame musciale afin de pouvoir réactiver, à son retour, les sensations ressenties durant le voyage, comme on le fait avec les photos.»

Tourisme urbain

La vision bucolique qui associe automatiquement le tourisme à une île paradisiaque ou aux montagnes est fausse, estime le chercheur. «Bientôt, 70 % des habitants de la planète habiteront en milieu urbain et ces gens voyagent… dans d'autres villes. Voilà pourquoi le tourisme s'urbanise. On pense souvent aux touristes étrangers qui viennent ici et qui veulent de grands espaces. Il y en a, bien sûr, mais la majorité est à Montréal.»

Encore davantage de modèles disruptifs

Les modèles d'affaires à la Airbnb et UberX ne sont pas à la veille d'être mis hors-jeu, au contraire. «De nouveaux modèles d'affaires verront le jour et nous croyons même que ces tendances vont s'institutionnaliser», explique Paul Arseneault.

Hybridation des lieux et des fonctions

Les lieux d'hébergement, comme les hôtels, ne seront plus à vocation unique. «On assistera à de nouvelles propositions qui permettront de combler les moments creux de l'année, précise le professeur. Pourquoi ne pas transformer un étage complet en résidence d'artistes, par exemple, ou en incubateur d'entreprises ? Il n'en tient qu'à l'industrie de trouver des façons innovantes d'utiliser ses lieux.»

Nouvelles saturations et refus du tourisme

À partir des années 1960, l'essor du tourisme a incité les dirigeants et les acteurs du milieu à se doter de règles afin de baliser l'industrie. Puis, au tournant des années 1990, on a vu apparaître le tourisme durable. «La prochaine vague est la saturation de certains marchés et le refus, en quelque sorte, du tourisme, note Paul Arseneault. C'est notamment le cas à Barcelone, où la mairesse a affirmé que le nombre de touristes ne devait plus augmenter, car les nuisances sont désormais plus élevées que les bénéfices pour les habitants de la ville. D'autres lieux sont trop fréquentés, comme Venise ou le Machu Picchu. Les océans qui montent joueront également un rôle, car certains endroits n'existeront tout simplement plus à la fin du siècle.»

Innovation ouverte et cocréation

L'ancien modèle de l'industrie touristique était simple: un promoteur et un architecte planifiaient et réalisaient un projet, qui était ensuite rendu accessible au public. «Dorénavant, le client est impliqué au tout début du processus afin qu'il participe à la création des lieux. Son avis façonne la réalisation des nouveaux projets touristiques. C'est une nouvelle manière de gérer l'offre touristique en s'assurant une clientèle engagée», explique le chercheur.

De la mobilité à l'omniprésence

Avec tous les appareils mobiles en circulation, nous sommes déjà dans l'ère du tourisme de mobilité et cela ira en s'intensifiant. «La technologie permet de se projeter dans la destination, mais aussi d’être partout et nulle part à la fois, explique Paul Arseneault. L'industrie touristique devra ajuster son offre à la réalité virtuelle et augmentée. Il sera possible de multiplier les expériences touristiques sans même se déplacer. C'est un monde de possibilités, parfois effrayantes en un sens car les relations virtuelles ne sont pas l'équivalent d'une rencontre en chair et en os, mais les générations de gamers et d'adeptes de jeux vidéo qui socialisent en ligne ne le conçoivent pas ainsi. Ils contribueront à transformer l'expérience touristique.»

L'apogée de la personnalisation

Une compagnie aérienne teste présentement le «nec plus ultra» de la personnalisation touristique. À l'aide d'une application dans laquelle sont enregistrés des renseignements sur les voyageurs – y compris des photos –, les hôtesses de l'air sont en mesure d'aborder les gens assis dans l'avion par leur nom et savoir ce qu'ils ont consommé lors de leurs vols précédents. D'autres compagnies testent des algorithmes qui permettent de mesurer l'adéquation entre les recherches effectuées sur les appareils mobiles et ce que les gens ont réellement acheté ou visité comme lieux. «On n'a pas idée à quel point nos téléphones intelligents amassent des données sur notre vie quotidienne jusque dans ses moindres détails», souligne Paul Arseneault.

La quête permanente du mieux-être

L'industrie touristique s'inscrit depuis quelques années dans la quête du bien-être, qui vise un équilibre entre plaisirs gastronomiques avec menus santé, soins pour le corps, détente, etc. «On vous promet dorénavant de mieux dormir pour être plus reposé et en faire plus le lendemain! Ce n'est pas nécessairement quelque chose de positif en soi, mais le tourisme ne fait que répondre à une demande bien réelle. La performance s'est infiltrée partout et l'industrie touristique n'y fait pas exception.»

Tourisme immersif et quête d'authenticité

Enfin, le tourisme immersif et la quête d'authenticité seront incontournables. «Personne ne veut avoir l'air d'un touriste quand il voyage, note Paul Arseneault. Voilà pourquoi on développe des applications ou des services qui renforcent le sentiment de se fondre dans la faune locale, comme la chaîne Hilton qui ouvre certains établissements sans gym, préférant offrir à ses usagers des laisser-passer dans un gym local. Une entreprise teste présentement un collier qui traduit en temps réel les propos de votre interlocuteur, réduisant ainsi la barrière linguistique. C'est aussi le cas d'un opéra à Paris qui teste des lunettes avec sous-titres intégrés.» 

Tourisme 2015
L’hyperpersonnalisation, l'hyperconnexion, le retour des Américains et l'émergence de la Chine comptent parmi les grandes tendances.

22 JANVIER 2015 À 16H47

 

Photo: iStock

C'est en voie de devenir une tradition. Chaque année, depuis 2013, la Chaire de tourisme Transat de l’École des sciences de la gestion, en partenariat avec Tourisme Montréal, dresse le palmarès des tendances dans le domaine du tourisme sur les scènes locale, nationale et internationale. La chaire s'est de nouveau prêtée à l'exercice, le 21 janvier, en dévoilant les 15 grandes tendances touristiques qui, en 2015, influenceront les décisions des consommateurs et des acteurs de l'industrie. La présentation s'est faite dans le cadre d'une édition spéciale des Gueuletons touristiques, qui a accueilli près de 300 personnes.

«Bien sûr, nous n'avons pas de boule de cristal, mais nous essayons de réfléchir au développement et à l'évolution de tendances qui, contrairement aux effets de mode, s'inscrivent dans la durée», souligne Paul Arseneault, professeur en gestion des organisations touristiques au Département d'études urbaines et touristiques.

Marketing hyperpersonnalisé

Selon le chercheur, «nous vivons actuellement à l'ère de l'ego-portrait, où la mise en scène de soi dans un décor touristique est plus importante que le décor lui-même. D'où l'importance grandissante dans la promotion touristique des éléments visuels.» La popularité des caméras de type Go Pro, que portent les aventuriers pour filmer leurs exploits, et des bornes à selfie pré-identifiées devant des hauts-lieux touristiques illustre  bien l’importance du phénomène.

La transformation des comportements du client et des supports technologiques, la multiplication des canaux et l’hyperpersonnalisation poussent ainsi le marketing de masse vers la sortie. Place désormais au marketing de créneau hyperpersonnalisé ! «On va encore plus loin avec l'hyperconnectivité, soit la multiplication des objets connectés à Internet – téléphones, montres, bracelets – qui permet de générer de nouvelles façons de recevoir et de consommer les données et aussi de s'orienter dans les destinations touristiques», note Paul Arseneault. Bien gérées et choisies de façon judicieuse, ces informations permettront de personnaliser davantage l’offre, et ce, de façon instantanée.

Un cocon de confort

Dans le domaine de l'hôtellerie, le bien-être du client est plus que jamais au cœur des préoccupations. Cela passe notamment par une bonne nuit de sommeil: offrir des matelas et des oreillers de grande qualité, des chambres insonorisées et un contrôle de la température et de la luminosité. Évidemment, les technologies jouent un rôle clé dans cette quête de bien-être. Par exemple, des hôteliers proposent une bande passante efficace pour une connexion Internet rapide, un service de conciergerie numérique, etc. Bref, la chambre se transforme en un cocon de confort.

USA come back

Déjà observée en 2014, le retour en force du marché américain devrait se poursuivre cette année. Avec une économie américaine sortie de la récession, des Américains qui dépensent plus en divertissements, un indice de confiance à la hausse, un taux de change favorable et la chute du prix de l'essence, «les conditions semblent réunies pour qu'une nouvelle génération d'Américains fréquente le Québec, observe le professeur. L'enjeu est important, car le Québec, au cours des 12 dernières années, a perdu environ un million de touristes provenant des États-Unis.»

Un joueur incontournable

Selon Paul Arseneault, «le grand boom touristique se produit actuellement en Asie». La Chine, notamment, s'impose de plus en plus comme un opérateur touristique d'envergure. La croissance de son commerce international, des partenariats avec d'importantes entreprises touristiques en Asie-Pacifique et l’acquisition d'actifs occidentaux, comme le Club Med et le Château Montebello, démontrent bien son dynamisme. En 2015, la Chine pourrait même devenir le plus grand marché de voyageurs d’affaires internationaux, dépassant les États-Unis.
Voir la vidéo de la conférence à l'adresse suivante: http://www.ustream.tv/recorded/57831273